Victor Abeels, I.C.Ch 1963,

raconte sa carrière d’ingénieur chez Shell... 

Ingénieur chimiste de la promotion 1963, je fais mon service militaire et suis engagé par Belgian Shell le 28 décembre 1964 ‘’à l’essai, pour une période de 3 mois, aux appointements annuels bruts de 200.000 F ‘’.

Je suis affecté à l’unité ‘’ Application & Development Liquefied Petroleum Gases ‘’ ; le gaz naturel n’est pas encore disponible en Belgique et le propane est le combustible idéal pour les équipements industriels qui nécessitent un combustible propre, à pouvoir calorifique élevé et constant. Je conçois des séchoirs et des fours pour diverses industries et assure leur mise en service.

En 1967, je deviens ‘’ délégué technico-commercial Travaux Publics ‘’ ; les entrepreneurs routiers sont de gros consommateurs de produits pétroliers (carburants, lubrifiants, bitumes), surtout en ces années où se construit le réseau autoroutier.

Deux ans plus tard, je suis nommé responsable technique ‘’ Bitumes ‘’ au sein de la division ‘’ Technical Assistance & Development ‘’. A cette époque Shell dispose à Gand d’une petite raffinerie qui traite un brut lourd vénézuélien, le Tia Juana Pesado, qui contient surtout du bitume, des huiles de base pour lubrifiants et un peu de gasoil. A coté des différents types de bitumes pour la construction routière et les membranes d’étanchéité, on y fabrique aussi une large gamme de bitumes fluidifiés par solvants et des émulsions de bitume. Je suis chargé de promouvoir l’utilisation de ces produits et d’en formuler de nouveaux pour répondre aux besoins des clients.

En 1972, je suis transféré à la division ‘’ Supply ‘’ et chargé des achats de pétrole brut et des programmes de raffinage dans le cadre d’un contrat de ‘’ Processing ‘’de 3.000.000 tonnes/an conclu avec la raffinerie de Shell Nederland à Rotterdam.

Retour ensuite à ‘’ Technical Assistance & Development ‘’ comme chef de division ; T.A.D. comprend des unités carburants et combustibles, lubrifiants et bitumes.

En 1977, on me suggère, à ma grande surprise, de devenir responsable des ‘’ Relations Industrielles ‘’ et de ‘’ Formation ‘’ et 2 ans après aussi de l’unité ‘’Administration du Personnel’’ (payement des appointements et salaires, cotisations sociales, pensions extra-légales) ; à ce moment Shell Belgique emploie environ 1700 personnes, gère des bureaux et des installations à Anvers, Bruges, Bruxelles, Gand, Hasselt et Liège et compte 5 Conseils d’Entreprise.

En 1985, on me propose une affectation à Shell Gabon, une société ‘’Exploration-Production‘’ du Groupe Shell. Pendant 3 ans j’y assure la gestion du personnel expatrié, la plupart ingénieurs et géologues, de nationalité principalement hollandaise (1/3), anglaise (1/3) et française (1/4). Pendant mon séjour à Port-Gentil, mes collègues géologues découvrent le champ pétrolier de Rabi, le plus grand du Gabon, dont la production a culminé à 40.000 m3/jour.

De retour en Belgique en 1988, je prends la direction de la division ‘’ Supply ‘’ ; celle-ci est chargée de mettre à la disposition de la fonction ‘’ Marketing ‘’ tous les produits pétroliers qu’elle prévoit de vendre. Comme nous n’avons pas de raffinerie classique, les carburants et combustibles sont achetés en majeure partie à Shell Nederland sur base d’un contrat annuel et acheminés par allèges de Rotterdam vers les dépôts. Les ventes fluctuant en fonction des conditions atmosphériques et des gains ou pertes de gros contrats, il faut régulièrement acheter ou vendre des produits sur le ‘’marché spot ‘’ ; c’est notamment le cas du propane, un combustible très saisonnier, difficile à stocker.

En 1992 je deviens Directeur du Personnel. A ce titre j’aurai à négocier et à gérer les aspects ‘’ Ressources Humaines ‘’ de plusieurs cessions et reprises d’activités. En 1993, les produits phytopharmaceutiques sont cédés à American Cyanamid ; en 1995, Belgian Shell reprend les principales activités d’Elf Aquitaine en Belgique et en 1996, la clientèle propane et butane de Fina. En 1998, dans le cadre de l’organisation Shell Europe, qui se met en place, l’usine de production de lubrifiants à Gand est fermée.

Préoccupé par un bon équilibre entre l’intérêt de l’entreprise et les aspirations et le bien-être du personnel, je propose aux membres du personnel de s’exprimer via une enquête sociale ; j’organise aussi une formation en vue d’une meilleure compréhension et gestion du stress au travail.

En 1997 on me confie la responsabilité du ‘’ Supply ‘’ et de la ‘’ Distribution ‘’

(gestion des dépôts et transport des produits pétroliers chez les clients) en plus des ‘’Ressources Humaines‘’.

Une des caractéristiques du Groupe Shell est l’indépendance de gestion des filiales nationales, du moins jusqu’en 1998. Cette année voit la création de Shell Europe et l’instauration d’une organisation très centralisée à ce niveau. J’ai 58 ans et suis assez proche de l’âge de la retraite (60 ans à cette époque chez Shell) ; mes collègues directeurs du Marketing et de Finances ont un âge semblable. Les nouveaux responsables de Shell Europe estiment, à raison, que nous aurons difficile à implémenter avec enthousiasme un changement aussi radical d’opérer et nous sommes tous trois ‘’dispensés de prestations à partir du 1er avril 1998 ‘’!

Les possibilités d’une carrière aussi riche et variée au sein d’une filiale d’un grand Groupe sont sans doute devenues plus rares aujourd’hui car la centralisation de la gestion au niveau européen si pas mondial s’est généralisée. Les opportunités se sont par contre développées si on est prêt à accepter les contraintes, notamment familiales, d’une carrière d’expatrié.

Bon vent, bonne route aux jeunes ingénieurs qui viennent de me lire … et aux autres.

 

Christian Triquet, Allemagne et Guy Posschelle,USA,

tous deux I.C.Mét 1963, racontent... 

 

"FLOTTATION DU CUIVRE PAR L´HUILE DE PALME! UN TRAVAIL DE FIN D´ETUDES PRÉDIT LE PARCOURS DE DEUX INGENIEURS - Guy Posschelle, un Ingéneur-Entrepreneur ; Christian Triquet ,un Ingénieur- Inventeur. 

En 1963, à B-Leuven, Christian Triquet, ayant terminé son travail de fin d´études avec Guy Posschelle sur la " Flottation du Cuivre par l´huile de palme." est promu Ingénieur Civil Métallurgiste avec la mention "Distinction". Il prend la décision "d´inventer au profit de l´industrie privée". Au Laboratoire Suisse de Recherches Horlogères à Neuchatel (Suisse),à l´Institut Battelle de Genève, à Métallurgie Hoboken ( Belgique) et à Europa Metal AG ( Deutschland), il participe comme co-inventeur à de nombreuses inventions et demandes de brevets.

Comme Ingénieur de production, il met au point lui-même ces nouveaux produits et procédés : four de trempe sans déformation pour petites pièces de montres; micropalier autolubrifiant; alliage argent-indium pour cages de roulement à billes dans l´espace; alliage d´or dur pour boîtes de montres; réduction des déchets de la fabrication du rubis synthétique; tube en cuivre sanitaire résistant à la corrosion dans les eaux potables agressives; tubes en alliage de cuivre forgé à partir de bandes; flans monétaires en bronze résistant à l´abrasion; outillage traité en surface et à haute résistance à l'abrasion; déposition en phase gazeuse de rubis à la surface d´outils de coupe en carbures permettant d´augmenter considérablement la production; production industrielle de toiture en cuivre prépatiné; bloc de rive pour la fusion-coulée-laminage en continu de grande capacité de fil en cuivre; assistant l´utilisation de ces blocs dans de nombreux pays du monde on l´appelle "Mister Damblock"; tube composite en (cuivre/polymère) à paroi mince ( dernier brevet ) accordé par l´Office des Brevets de la République populaire de Chine...

Son contrat venant à expiration à 65 ans, il continue à travailler jusqu´à 70 ans comme Ingénieur-Inventeur auprès de sa Société. Il n´a jamais donné de conseils, mais avec ses co-inventeurs, il a dirigé les équipes produisant ces nouveaux produits ou utilisant ces nouveaux procédés. Certaines de ces inventions ont fait le tour du monde comme les outils de coupe en carbure SANDVIK GC015 revêtus d´alumine, d´autres se sont répandues dans toute l´Europe comme le tube sans corrosion "SANCO" ; d´autres encore sont restées limitées à un pays comme le nouveau four de trempe Suisse; d'autres encore n'ont pu être produites car les exigences de sécurité avaient changé; d'autres encore... A partir de 70 ans il a continué à inventer mais seulement pour lui-même : nouvelle douche solaire esthétique pour haute montagne. Aujourd’hui, Jean Triquet, Ingénieur Civil en Informatique de l´UCL dirige sa propre Société à Madrid. Vincent Triquet, Diplom-Ingénieur de la Fachhochschule d'Osnabrück travaille comme Ingénieur de l´Industrie Allemande. Au terme de ce parcours, l´Ingénieur Civil Métallurgiste de l´UCL Christian Triquet, pense avoir atteint son but ("inventer au profit de l´industrie privée"), prend la nationalité allemande et s´établit à Osnabrück dans le Land de D- Niedersachsen (Basse-Saxe).

 

55 ans de promotion, 50 ans d’expatriation 

François Mauriac disait : « C’est merveilleux la vieillesse, dommage que cela finisse si mal! » Moi je préfère la citation de Jean Anouilh : « On n’est vieux que le jour où on le décide… »

Comme je n’ai pas décidé encore, et avant de tout oublier, si cela vous intéresse : pêle-mêle de quelques souvenirs.

En 2001 Louvain Ingénieurs avait ouvert ses colonnes à ceux au parcours international…un article me concernant avait été publié en Octobre 2001. Il retraçait mes années d’études et premières années d’expérience en Europe et au Pakistan avant mon expatriation en 1968 : 50 ans déjà !

Apres 11 années merveilleuses passées au Mexique, j’atterris à Atlanta en 1979, à l’époque petite ville provinciale du Sud, qui a grandi depuis de façon exponentielle. Et finalement en 1986, je fais le grand saut en créant ma propre entreprise à Miami.

Cela fait donc 40 ans que je vis aux Etats Unis - « It is not really my cup of tea »- je préfère de loin le Mexique, mais à Miami, on survit. Depuis toujours j’étais fasciné par cette ville, la capitale de l’Amérique Latine ou, comme on dit souvent, la ville sud américaine la plus proche des USA. Ville cosmopolite par excellence, finie l’époque des retraités du nord venant y finir leurs jours, c’est trop cher ! A la place, une économie vibrante (2% de chômage), des investissements immobiliers impressionnants. Les immigrés cubains des années 50 cédant progressivement leur place aux nouveaux venus : Colombiens, Vénézuéliens, Argentins, Brésiliens…sans parler des Russes et des Européens (spécialement les Français : 30000 en Floride dont 20000 à Miami), plus quelques 100,000 Haïtiens, la plupart illégaux, qui font du français (teinté de créole) une des langues les plus parlées ici. Pas mal de jeunes Belges aussi, ce qui permet d’organiser tous les 1ers lundi du mois un Belgian Monday avec quelques 60 présents. Nous avons chaque semaine deux vols low cost et non stop sur Bruxelles avec TUIFly.

L’espagnol est la langue courante, cependant tous les avis et documents officiels et guichets sont trilingues : anglais, espagnol et créole. Quelques-uns de nos politiciens belges pourraient venir y faire un stage.

Entre missions de consultants dans les Amériques, Chine Russie ou Afrique, je suivais la croissance exponentielle de l’industrie de l’huile de palme en Amérique Latine, ce qui m’a décidé à me reconvertir dans ce secteur. Départ donc pour la Malaisie, pays leader du secteur, pour y chercher des contacts afin de me constituer un portefeuille de représentations d’équipements et de technologie. Ce fut un bon choix et la croissance de vente sur notre territoire fut rapide : bientôt un staff de 10 personnes plus un réseau d’agents au Mexique, Amérique Centrale, Colombie, Equateur et Brésil. En 2002 mon fils Hugues (diplôme de Georgia Tec et MBA de Penn State) après 10 ans passés dans la pétrochimie américaine, m’a rejoint et nous nous sommes diversifiés dans la production d’énergie à partir de biomasses. Donc outre des usines construites à Shah Alam en Malaisie, nous achetons des chaudières à Bangalore en Inde et des turbines à Campinas au Brésil. Entretemps des projets de réhabilitations d’anciennes plantations et usines d’huile de palme m’ont fait découvrir la RDC et le triste état des provinces du Bandundu et Mayumbe après 60 ans de décolonisation. J’ai eu l’occasion d’effectuer beaucoup de missions ailleurs en Afrique mais je ne vois pas comment en RDC, ils vont se tirer d’affaires et ils ne devront pas compter sur les Chinois pour le faire !

Je crois que dans la vie, les circonstances m’ont aidé. Mais la chance ne vient pas seule, il faut aller la chercher. Il faut parler aux gens, avoir l’audace de les contacter. It is not what you know, but who you know…Cela ma permis de côtoyer des personnages intéressants, je pense à l’ex Président Blanco de la République Dominicaine qui après quelques pinas coladas, m’avait prêté son hélicoptère (heureusement avec pilote) pour étudier une implantation industrielle sur l’Île ; Les ex-Présidents Mexicains : Vicente Fox et Felipe Calderon à qui j’ai dû - comme porte-parole de nos clients - vendre les mérites de la palmiculture et son industrialisation. Pareil à Cuba, où Ramon Castro (le frère de Fidel et Raul) me disait que ce n’est pas lui qui ressemblait à ses frères, mais le contraire vu qu’il était l’aîné ; le financier Anglo-français Sir James Goldsmith- qui en plus de l’Express et de Goodyear, était aussi grand investisseur en plantation. Aussi quelques Belges dont des Ambassadeurs de classe (ils se font rares), le ministre de l’Agriculture du Samoa Occidental (un anversois,) …et même à Miami la fille de notre professeur de chimie physique André LUICKX, elle-même mariée au doyen (lui-même Belge) d’une chaire de médecine à l’Université de Miami. Je me suis aussi mêlé à la politique belge : via l’UFBE (Union francophone des Belges à l’Etranger), j’ai participé aux négociations pour l’obtention de la double nationalité. Nous avons mené cela à bien avec la Ministre Onkelinx (Laurette elle-même). Si maintenant vous pouvez garder votre passeport belge tout en acquérant une autre citoyenneté, vous me le devez en partie !

Comme bilan, je dirais que dans la vie comme en affaires, outre la chance, il faut beaucoup d’optimisme et d’obstination. Le monde change, même en l’ère actuelle de Whatsapp, Facebook, Uber et Airbnb, il n’y a pas de travail opiniâtre et surtout d’optimisme qui ne finisse par porter ses fruits. Nous avons été a bonne école au cours de nos études et j’espère qu’il en demeure de même pour les nouvelles promotions.

Finalement je voudrais saluer mon épouse Françoise. Nous allons bientôt fêter nos 54 ans de mariage ! Le secret de la vie de couple est, je crois, cimenté par de multiples séparations qui renforcent les liens au retour.

A mes camarades de promotion, j'espère vous revoir aussi nombreux à notre prochaine réunion et aux jeunes promotions je vous souhaite bonne chance et surtout de l’Audace, toujours de l’Audace !

Guy Posschelle IC Met UILv, 1963 Miami Fl. USA gaexp@aol.com